Cette intervention est basée sur mon expérience personnelle dans une carrière professionnelle en tant qu’interface au sein des territoires ruraux (direction de parc naturel, conseiller en Développement rural). Elle s’inscrit dans la recherche sur le numérique et l’action territoriale citoyenne, dans le cadre des défis du développement rural et du développement durable, et plus précisément sur la question de savoir en quoi le nouveau numérique accroît-il le développement territorial rural en se mettant au service de l’action territoriale citoyenne.
Cette communication d’innovation permettra d’analyser les outils de questionnement, la participation citoyenne et le recours au numérique des représentations spatiales (Maurel, 2012) dans le développement de projets liés à l’aménagement du territoire rural.
Nous présenterons des outils de questionnement, de représentation et de co-construction, qui existent sur ces deux territoires et la manière envisagée de les mettre en action sur le terrain en nous appuyant sur le raisonnement des sciences de l’information et de la communication.

Les Technologies de l’Information et de la Communication donnent les moyens d’une meilleure lecture et un accès plus généralisé au territoire réel dans ses caractéristiques physiques et culturelles. Plus récemment, elles offrent une nouvelle dimension territoriale basée sur les concepts archipellaires d’une part, mais aussi d’autre part inscrite dans un nouvel univers lorsqu’on verse dans un territoire virtuel particulier tel que l’illustre à l’extrême le Metaverse où nos voisins deviennent quasi réels dans un autre bassin de vie avec ses aléas propres d’aménagement territorial qui va de pair avec une citoyenneté numérique. Une nouvelle approche de l’identité territoriale se réalise par le numérique pour une Intelligence Territoriale renforcée.

L’identification au territoire sera au cœur de notre développement. Nous aborderons le concept archipellaire avec ses déclinaisons physique, administrative, géographique et affective, ainsi que numérique.

Dans quelle mesure le dialogue Homme-Machine crée donc également un archipellaire numérique jusqu’au point de supplanter l’archipellaire physique classique pour le verser dans une dimension virtuelle hautement sociale où la dimension physique est reléguée à un support artistique par l’intégration des paysages affectifs dans cet univers numérique. Cela vient renforcé notre idée d’un tout territorial constitué d’éléments différents.

Notre réflexion nous a amené à analyser cela sous l’angle métaphorique d’une dynamique amibienne des territoires archipellaires géographique et numérique. Une approche donc métaphorique, voire esthétique, pour illustrer les réalités de l’identité territoriale et donc les visages de l’identité citoyenne contemporaine.

L’adaptabilité des frontières territoriales au contexte et aux circonstances découle directement de la souplesse des réseaux qui permettent des usages numériques à partir d’une identité numérique élémentaire. Elle résulte par ailleurs des comportements humains dans le rapport au territoire et à la citoyenneté, jusqu’à la participation citoyenne augmentée pour le développement rural. Notre travail de terrain nous a amené à observer ces éléments lors d’entretiens semi-directifs au sein de la population açorienne afin de déterminer les points saillants qui illustrent ce rapport entre l’humain et les technologies numériques en plein développement sur le territoire.

L’intérêt de notre approche se situe dans le recueil des habitus (Bourdieu P., 2001) des citoyens au niveau de leur langage et de leurs usages des TIC. Pour illustrer notre analyse, nous avons défini un concept d’ « amibe archipellaire numérique » qui se base d’une part sur la dynamique amibienne (Fatès N., 2019) où l’internet est un réseau dont la forme se module et l’information correspond alors à la forme que prend le réseau pour l’acheminer, de même que la manière de participer au réseau transforme le réseau (Berns T., Reigeluth T., 2021, 54-57). Nous avons donc une forme constamment changeante selon les échanges d’informations fournis par chaque utilisateur dans son territoire numérique tel que nous le définirons. D’autre part nous nous appuyons sur le concept d’ « archipellaire » au sens de la géographie contemporaine en milieu urbain (Lévy J., Lusso M., 2003) mais que nous extrapolons en milieu rural.
Notre démarche vise à déterminer si le citoyen usager des TIC s’inscrit de telle manière dans de nouvelles frontières territoriales où il fonde une identité innovante, et si ces frontières répondent à la dynamique amibienne par un changement constant et spécifique de sa périphérie territoriale.

La perception du paysage et de l’aménagement du territoire par le citoyen rural est inscrite dans le discours, telle “la parole du paysage” (Glissant, 1997). Ce dialogue peut être renforcé par l’apport du numérique dans cette perception (cartes perceptuelles à l’appui), et cette perception est une des clés d’entrée d’analyse du rapport aux caractéristiques physiques et écologiques du territoire ainsi que plus récemment ses caractéristiques numériques. Nous pouvons nous demander par ailleurs si le système archipellaire açorien est plus avide par sa nécessité géographique d’un recours généralisé aux TIC que le système continental où les liens sociaux sont moins soumis à une barrière physique. La configuration des TIC serait alors intimement liée à la configuration spatiale.

L’influence des Technologies de l’Information et de la Communication sur les formes traditionnelles de participation citoyenne est un accélérateur d’intelligence territorial, et en résulte probablement un déterminisme identitaire.

En conclusion, notre méthodologie sera principalement centrée sur les Sciences de l’Information et de la Communication, avec un apport pluridisciplinaire (géographie, philosophie, littérature, sciences sociales, semio-linguistique, sciences de l’Information et de la Communication). Cette présentation se basera essentiellement sur une analyse de contenu théorique mais développera certaines approches de terrain avec des types d’outils tels que des entretiens semi-directifs. La question que nous posons est de savoir si le développement des technologies de l’information et de la communication favorisent l’émergence d’un territoire numérique de mode archipellaire doté d’une dynamique originale.